L'adjudante Béatrice Hivert a été décorée par le Préfet de Vendée Jean-Benoît Albertini lors des cérémonies du 11 novembre à La Roche sur Yon (photo personnelle)
"C'est un immense honneur, et je suis très fière de recevoir cette médaille". Servant à la COB de Luçon sous les ordres du capitaine Pacaud, l'adjudante Béatrice Hivert a en effet toutes les raisons d'être fière. Et elle n'est pas prête d'oublier cette nuit du 8 mars 2016 qui lui vaut aujourd'hui cette haute distinction, la médaille de bronze pour acte de courage et de dévouement.
Cette nuit là, elle patrouille avec un de ses collègues. Ils écoutent le CORG ( le centre opérationnel d'opération et de renseignement de la gendarmerie ) qui relaie tous les appels au 17 sur le département. Vers 22h30, le CORG appelle la patrouille de La Roche sur Yon. Un habitant de Sainte-Pexine vient d'appeler sa famille. Il leur a dit adieu et annonce qu'il va se jeter d'un pont. Pas plus d'infos et la patrouille de La Roche se met donc en route mais prévient qu'elle est de l'autre côté de la ville, et qu'elle risque de mettre un peu de temps à intervenir.
Sainte-Pexine, ce n'est pas le secteur des gendarmes luçonnais, mais l'adjudante Béatrice Hivert répond elle aussi à l'appel. " Nous étions plus près, en 10 minutes nous pouvions être sur place " nous explique t'elle. " Nous fonçons aussitôt au domicile de cet homme ". Sur place, le fils, très abattu, qui ne sait pas où est son père. " Il avait cherché, mais rien. Pour lui c'était fini. Mais nous décidons toutefois de chercher nous aussi et notamment vers le pont qui se trouve à proximité du domicile de ce Monsieur ". Tous gyrophares allumés pour tenter de percer la nuit, les gendarmes stationnent sur le pont et scrutent les alentours. " Nous avons coupé le moteur pour essayer de capter un bruit. Et tout à coup de mon côté, j'entends un espèce de râle. J'appelle, puisque j'avais le nom de la victime, et le râle se fait plus fort. Il était évident que c'était lui ".
Aussitôt les gendarmes descendent en bas du pont, sur la berge et se mettent à chercher. " Il faisait nuit noire, nous avions seulement nos torches pour éclairer et nous ne cessions d'appeler ". Et tout à coup, l'adjudante stoppe net. " Je l'ai vu. Il y avait juste sa tête qui sortait de l'eau. Il était accroché à des espèces de branchage au milieu de la rivière ". Une vision qui lui revient sans cesse en mémoire depuis. Mais pas le temps d'avoir peur. " Il fallait réfléchir rapidement et surtout prendre la bonne décision. Le CORG nous avait renseigné sur lui. Je savais qu'il était désespéré et que c'était une question de minutes avant qu'il ne lâche ". La gendarme prend alors la décision d'aller dans l'eau. " J'enlève mes chaussures, mon blouson, mon arme et je descends dans l'eau. Elle était glaciale, 5 à 6°, pas plus. En avançant, je lui parle, sans cesse. J'essaie de le raisonner, de lui dire qu'on est là et qu'on ne le laissera pas tomber ". Mais le courant et le sol vaseux rendent difficile la progression de la gendarme. " Je suis tombée, j'avais de l'eau jusqu'aux épaules et là je me suis rendue compte que je n'arriverai pas à l'atteindre ". La mort dans l'âme, elle rebrousse donc chemin. Son collègue va tenter lui aussi de ramener la victime, mais il doit également faire demi tour rapidement.
Heureusement, les sapeurs pompiers arrivent alors sur place, mais décident d'attendre le plongeur. Le cours d'eau à cet endroit est trop dangereux. Et c'est donc le plongeur qui finira par sortir la victime de l'eau. L'homme est en hypothermie, mais survivra.
Depuis la gendarme luçonnaise ne cesse de refaire le film de cette soirée. " Je ne me voyais pas ne rien faire, ne rien tenter. On ne pouvait pas rester là sur la berge à le regarder, et au bout du compte le laisser partir. Parce qu'il aurait lâché ".
Béatrice Hivert a donc eu un comportement extrêmement courageux ce soir là et c'est pourquoi d'ailleurs le chef d'escadron Deltombe, commandant la compagnie de gendarmerie de Fontenay-le-Comte, dont dépend Luçon, l'a proposé pour recevoir cette médaille en saluant sa " belle disponibilité en se rendant d'initiative sur les lieux, sa réactivité remarquable et son indéniable courage en entrant dans la rivière malgré le danger et la température de l'eau ". Et d'ajouter " Elle a su évaluer les risques qu'elle prenait et renoncer quand ils devenaient excessifs ".
Et si son entraînement de gendarme a joué, notamment pour évaluer les risques, son acte n'en reste pas moins des plus courageux et sa médaille des plus méritées !
La gendarme Béatrice Hivert chez elle.
Crédits photos : TLSV